Accéder au contenu principal

États généraux de l’information : « Bolloré peut dormir tranquille »

  Par  Alexis Lévrier , Sorbonne Université Grand chantier voulu par Emmanuel Macron, les États généraux de l’information ont mobilisé 22 assemblées citoyennes, 174 auditions, des dizaines de contributions écrites, et ce, pendant 9 mois de travaux. Leurs préconisations ont été remises au président de la République, jeudi 12 septembre. Répondent-elles à « l’urgence démocratique », alors que le journalisme et le droit à l’information sont menacés ? Entretien avec le chercheur Alexis Lévrier. Comment avez-vous reçu les conclusions de ces États généraux de l’information voulus par Emmanuel Macron ? Il s’agit d’une immense déception. Concernant les médias, la seule promesse de campagne du candidat Macron, c’était ces États généraux de l’information (EGI). Ils ont été lancés d’une manière très solennelle, puis de nombreux intervenants de qualité ont participé aux groupes de travail. Le rapport pointe justement une urgence démocratique à protéger et à développer le droit à l’

Atos : quels enseignements tirer d’une débâcle spectaculaire ?

atos


Par Jean-Paul Alibert, CEO de T-Systems France

Quel avenir pour Atos, ex-fleuron français de l’informatique ? Entre annonces, rebondissements et échéances, c’est la question qui anime nombre de débats économiques et politiques. La gestion de l’activité d’infogérance d’Atos est une vraie source d’enseignement dans la compréhension de la faillite actuelle. Tirons-en les leçons pour prendre, pour nos entreprises, des directions stratégiques porteuses et pérennes.

Acquérir sans vraiment intégrer : l’erreur première d’Atos

Atos a construit sa croissance sur une stratégie d’acquisition massive. Le sujet n’est pas ici de savoir si les rachats étaient ou non pertinents, mais bien de questionner l’intégration des différentes structures au fur et à mesure des fusions. N’oublions pas qu’une réorganisation consomme environ 25% des ressources en temps et en énergie des équipes. Ces dix dernières années, il y a eu au sein d’Atos une réorganisation par an, imputant considérablement la valeur ajoutée des différents métiers. En outre, les multiples changements de direction ont déstabilisé l’entreprise.

La division d’infogérance d’Atos a été victime de cette stratégie. Trop surchargé en coûts financiers, il n’a pas pu investir dans son cœur de métier et dans le développement d’offres clés (comme le cloud) qui l’auraient positionné sur l’avenir de son secteur. Les résultats opérationnels n’ont pas été au rendez-vous, dégradant à la fois l’image et la compétitivité de cette activité d’Atos. Plutôt que de concentrer les énergies sur la réorganisation, il aurait fallu traiter les problèmes de fond, et développer l’infogérance d’infrastructures IT comme un modèle industriel propre, afin de rester agile sur un marché en mouvement perpétuel.

L’adaptabilité du modèle industriel : un impératif absolu

Le secteur de la technologie étant en perpétuelle évolution, il est essentiel de s’adapter continuellement, et de trouver le juste équilibre entre maintien d’un cap stratégique et repositionnements réguliers. Les transformations structurelles des entreprises de l’infogérance doivent se décider et se traiter à l’horizon de leurs contrats, donc au moins cinq ans.

Accepter de transformer son modèle pour rester compétitif, c’est être capable à la fois de comprendre l’évolution de la demande du marché, et d’adapter son « delivery », soit l’ensemble des étapes et processus permettant la bonne réalisation d’une mission (études, planning, reporting, budget…).

De nombreuses erreurs de positionnement sont en effet la résultante d’une vision court terme guidée par le rendement immédiat. Certains fonds et banques d’affaires ont ainsi tendance à privilégier des opérations de fusion ou d’acquisition qui ne correspondent ni au rythme industriel ni à la réalité de terrain.

Le marché de l’IT est riche d’exemples d’entreprises ayant bien négocié ce tournant stratégique. Prenons le cas des éditeurs de logiciels. Il y a 10 ans, ils vendaient des licences. Aujourd’hui, ils sont tous fournisseurs de SaaS.

Intelligence artificielle : le nouveau virage technologique à ne pas manquer

S’il y a bien un sujet qu’il est impératif de considérer avec attention, c’est celui de l’intelligence artificielle. Cette dernière représente une nouvelle forme de disruption qui révolutionne le rapport aux services professionnels.

Une partie des acteurs ont déjà amorcé des changements stratégiques pour intégrer l’assistance des algorithmes dans l’ensemble de leurs services informatiques. Les métiers du développement, de l’infogérance et de la cybersécurité, doivent être à la pointe de l’innovation. Rester alerte et réactif est essentiel.

Les erreurs de positionnement commises par Atos sur le marché du cloud ne doivent pas se reproduire avec l’intelligence artificielle. Intégration lors des fusions-acquisitions, agilité et adaptabilité, opportunités liées à l’IA… tirons les enseignements de l’expérience Atos : il en va de la compétitivité et de la pérennité de nos grandes entreprises françaises. 

Posts les plus consultés de ce blog

Le bipeur des années 80 plus efficace que le smartphone ?

Par André Spicer, professeur en comportement organisationnel à la Cass Business School (City University of London) : Vous vous souvenez des bipeurs ? Ces appareils étaient utilisés largement avant l'arrivée massive des téléphones portables et des SMS. Si vous aviez un bipeur, vous pouviez recevoir des messages simples, mais vous ne pouviez pas répondre. Un des rares endroits où on peut encore en trouver aujourd’hui sont les hôpitaux. Le Service National de Santé au Royaume-Uni (National Health Service) en utilise plus de 130 000. Cela représente environ 10 % du nombre total de bipeurs présents dans le monde. Une récente enquête menée au sein des hôpitaux américains a révélé que malgré la disponibilité de nombreuses solutions de rechange, les bipeurs demeurent le moyen de communication le plus couramment utilisée par les médecins américains. La fin du bipeur dans les hôpitaux britanniques ? Néanmoins, les jours du bipeur dans les hôpitaux britanniques pourraient être compté

Comment les machines succombent à la chaleur, des voitures aux ordinateurs

  La chaleur extrême peut affecter le fonctionnement des machines, et le fait que de nombreuses machines dégagent de la chaleur n’arrange pas les choses. Afif Ramdhasuma/Unsplash , CC BY-SA Par  Srinivas Garimella , Georgia Institute of Technology et Matthew T. Hughes , Massachusetts Institute of Technology (MIT) Les humains ne sont pas les seuls à devoir rester au frais, en cette fin d’été marquée par les records de chaleur . De nombreuses machines, allant des téléphones portables aux voitures et avions, en passant par les serveurs et ordinateurs des data center , perdent ainsi en efficacité et se dégradent plus rapidement en cas de chaleur extrême . Les machines génèrent de plus leur propre chaleur, ce qui augmente encore la température ambiante autour d’elles. Nous sommes chercheurs en ingénierie et nous étudions comment les dispositifs mécaniques, électriques et électroniques sont affectés par la chaleur, et s’il est possible de r

Quelle technologie choisir pour connecter les objets ?

Par Frédéric Salles, Président et co-fondateur de Matooma   En 2021, le nombre total d'objets connectés utilisés atteindra les 25 milliards selon Gartner. Il est ainsi légitime de se demander quelles sont les technologies principales permettant de connecter les objets, et quelle pourrait être celle la plus adaptée pour sa solution. Un projet de vidéosurveillance par exemple n'aura absolument pas les mêmes besoins qu'un projet basé sur le relevé de température au milieu du désert. Ainsi pour trouver la meilleure connectivité pour son objet, de nombreuses questions peuvent se poser : mon objet fonctionne-t-il sur batterie ou est-il alimenté ? Mon objet restera-t-il statique ou sera-t-il mobile ?  Mon objet est-il susceptible d'être dans un endroit difficile d'accès ou enterré ? A quelle fréquence mes données doivent-elles remonter ? Etc. Voici les différentes solutions actuellement disponibles sur le marché. Courte distance : RFID/Bluetooth/WiFi La RFID (Ra

De quoi l’inclusion numérique est-elle le nom ?

Les professionnels de l'inclusion numérique ont pour leitmotiv la transmission de savoirs, de savoir-faire et de compétences en lien avec la culture numérique. Pexels , CC BY-NC Par  Matthieu Demory , Aix-Marseille Université (AMU) Dans le cadre du Conseil National de la Refondation , le gouvernement français a proposé au printemps 2023 une feuille de route pour l’inclusion numérique intitulée « France Numérique Ensemble » . Ce programme, structuré autour de 15 engagements se veut opérationnel jusqu’en 2027. Il conduit les acteurs de terrain de l’inclusion numérique, notamment les Hubs territoriaux pour un numérique inclusif (les structures intermédiaires ayant pour objectif la mise en relation de l’État avec les structures locales), à se rapprocher des préfectures, des conseils départementaux et régionaux, afin de mettre en place des feuilles de route territoriales. Ces documents permettront d’organiser une gouvernance locale et dé

La fin du VHS

La bonne vieille cassette VHS vient de fêter ses 30 ans le mois dernier. Certes, il y avait bien eu des enregistreurs audiovisuels avant septembre 1976, mais c’est en lançant le massif HR-3300 que JVC remporta la bataille des formats face au Betamax de Sony, pourtant de meilleure qualité. Ironie du sort, les deux géants de l’électronique se retrouvent encore aujourd’hui face à face pour déterminer le format qui doit succéder au DVD (lire encadré). Chassée par les DVD ou cantonnée au mieux à une petite étagère dans les vidéoclubs depuis déjà quatre ans, la cassette a vu sa mort programmée par les studios hollywoodiens qui ont décidé d’arrêter de commercialiser leurs films sur ce support fin 2006. Restait un atout à la cassette VHS: l’enregistrement des programmes télé chez soi. Las, l’apparition des lecteurs-enregistreurs de DVD et, surtout, ceux dotés d’un disque dur, ont sonné le glas de la cassette VHS, encombrante et offrant une piètre qualité à l’heure de la TNT et des écrans pl

L’Europe veut s’armer contre la cybercriminalité avec le Cyber Resilience Act

  Par  Patricia Mouy , Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) et Sébastien Bardin , Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) Assez des cyberattaques  ? La loi sur la cyberrésilience, ou Cyber Resilience Act a été adoptée par les députés européens le 12 mars dernier et arrive en application dans les mois à venir, avec l’ambition de changer la donne en termes de sécurité des systèmes numériques en Europe. Alors que les systèmes numériques sont littéralement au cœur des sociétés modernes, leurs potentielles faiblesses face aux attaques informatiques deviennent des sources de risques majeurs – vol de données privées, espionnage entre états ou encore guerre économique. Citons par exemple le cas de Mirai , attaque à grande échelle en 2016, utilisant le détournement de dispositifs grand public comme des caméras connectées pour surcharger des domaines Internet d’entreprise, attaque de type DDoS (déni de service distribué)